La peur du conflit est présente en chacun de nous à différents degrés.
Mais qu’y a-t-il vraiment derrière cette peur ?
Pourquoi le simple fait de dire « non » peut-il nous sembler dangereux, comme si nous mettions la relation en péril ?
Dans cet article, nous allons explorer la peur du conflit sur un plan personnel, que ce soit dans un contexte amical, amoureux ou familial. La peur du conflit professionnel ne se joue pas au même endroit.
Aux origines : l’attachement et la peur de perdre le lien
Notre manière d’être en lien avec les autres prend racine très tôt. Dans l’enfance, c’est à travers la figure symbolique maternelle que nous apprenons ce qu’est la relation, la proximité, la sécurité. Même avec toute la bonne volonté du monde, il peut y avoir des manques, des silences, des absences.
Pour continuer à nous développer, nous créons alors des mécanismes pour combler ces espaces.
Plus tard, ce mode d’attachement ressurgit dans nos relations amicales, amoureuses et familiales.
Certaines personnes développent ainsi ce que l’on pourrait appeler des mécanismes de protection du lien et la peur du conflit en fait souvent partie.
Derrière cette peur, une croyance principale : “Si je suis en conflit avec l’autre, je risque de perdre son amour (et donc de le perdre).”
D’une certaine manière, en ne disant pas notre désaccord, nous préservons l’amour, la reconnaissance ou l’harmonie. Nous ne mettons pas en péril le lien à l’autre.
Dans cette logique, s’affirmer devient trop coûteux. Dire « non » revient presque à dire : « Je prends le risque de perdre ton amour.”
Le coût de l’évitement : quand se taire abîme aussi la relation
Sur le moment, cela semble protéger le lien : nous ne rentrons pas en conflit.
Nous ne disons rien, nous ne dérangeons pas, tout paraît au mieux… Tout va bien dans le meilleur des mondes possibles.
Mais qu’en est-il du coût à long terme ? Et quel est le coût pour vous ?
Si nous ne disons jamais non, nous ne disons jamais un vrai oui.
Si le non n’existe pas, le oui non plus. Il devient automatique, sans choix ni nuance. Nous disons oui par peur, par automatisme, par réflexe… mais en avons-nous vraiment envie ?
Nous acquiesçons pour ne pas perdre l’autre, et c’est compréhensible. Mais où sommes-nous, nous, dans cette relation ?
En ne disant jamais non, nous laissons tout le pouvoir et toute la responsabilité à l’autre. Ce n’est pas juste ni pour lui, ni pour nous. Cela crée un déséquilibre.
Finalement, l’autre se retrouve seul dans la relation : nous n’y sommes plus vraiment. C’est un monologue à deux. À force de vouloir préserver le lien à tout prix, nous nous oublions… jusqu’à parfois disparaître dans la relation.
Alors plusieurs questions se posent :
Est-ce vraiment le conflit que nous évitons, ou est-ce nous-mêmes que nous renonçons à montrer ? Cette auto-censure, cette adaptation excessive, n’abîme-t-elle pas parfois la relation plus encore qu’un conflit bien accompagné ?
Qu’est-ce que je ne montre pas de moi ?
Le mécanisme de protection du lien nous conduit souvent à la suradaptation.
Pour éviter le conflit, nous sommes prêts à tout : nous nous façonnons selon les besoins de l’autre, nous nous ajustons, nous nous modelons, nous renonçons à nous montrer tels que nous sommes.
Nous ne posons plus nos limites. Nous ne disons pas ce qui est acceptable pour nous. Nous nous coupons de nos propres besoins. Notre rôle devient de répondre à ceux de l’autre. Peu à peu, nous perdons notre authenticité.
Derrière ce masque, ce que nous cachons le plus souvent, c’est notre vulnérabilité : ce qui nous touche, ce qui nous fait peur, ce qui nous blesse, ce qui nous rend uniques. Nous craignons de décevoir, d’être rejetés, de ne pas être assez.
En faisant cela, nous privons l’autre de la possibilité de nous rencontrer réellement… et nous nous privons nous-mêmes de l’expérience d’être aimés pour ce que nous sommes vraiment.
À force de craindre de perdre l’amour de l’autre, est-ce nous que nous perdons de vue ?
Et ce risque n’est-il pas encore plus grand que celui de perdre l’autre ?
L’imaginaire du conflit
Pourquoi avons-nous peur de perdre l’autre dans un conflit, et sommes-nous prêts à nous sacrifier ?
Cela peut être lié à nos expériences, mais aussi à l’image que nous nous faisons du conflit.
Le conflit se définit comme une violente opposition de sentiments, d’opinions, d’intérêts ou de conceptions contradictoires chez une même personne ou au sein d’un groupe.
La notion de violence implique l’idée de cris, de gestes brusques, de rupture possible et la notion de contradiction, que deux positions ne peuvent pas coexister sans se heurter.
Comme si le seul moyen de poser ses limites ou d’exprimer ses besoins impliquait forcément de s’opposer à l’autre dans la violence. Et si ce n’était pas forcément le cas ? Et si nos besoins et nos opinions pouvaient justement coexister sans que l’un écrase l’autre ?
Alors, qu’est-ce qui bloque ?
Souvent, la confrontation émerge lorsque :
- vos mots ne correspondent pas à ce que l’autre a vécu ;
- l’autre se sent menacé, pas respecté ou pas entendu ;
- ce que vous dites touche à ses valeurs ;
- la manière de dire est perçue comme agressive.
Et si le problème n’était pas le désaccord lui-même, mais la manière dont il est exprimé ?
Et si vous pouviez dire les choses différemment, de façon plus douce, plus claire, plus entendable pour l’autre ?
Comment dire non tout en préservant le lien ?
Dire « non » ne rompt pas le lien. Au contraire, il peut le renforcer.
Il permet de créer un espace où chacun peut se montrer tel qu’il est, à sa place, en sécurité, et où la relation gagne en profondeur et en authenticité.
C’est un geste de respect : pour soi, pour l’autre, et pour le lien lui-même.
Trois éléments clés pour y parvenir :
- Être présent à soi-même : ressentir ses besoins, reconnaître ses limites, accueillir ses émotions.
- Rester présent à l’autre : écouter ce qui se joue pour lui, avec curiosité et bienveillance.
- Mettre des mots sur son expérience : parler de soi, de ce que l’on vit, sans reprocher, sans accuser, ni juger.
Quelques conseils pour faciliter l’exercice :
- Différencier à quoi je dis non : à une proposition et pas la personne en elle-même.
- Ne laissez pas de porte ouverte : si vous voulez vraiment poser votre limite.
- Proposez une alternative : par exemple, si vous êtes invité à dîner mais que vous êtes fatigué, suggérez de reprogrammer plutôt que d’annuler.
- Rome ne s’est pas faite en un jour : commencez par expérimenter des non “faciles”, et soyez doux avec vous-même dans ce processus.
- Rappelez-vous : chaque non posé est un pas vers plus de clarté, de sincérité et de respect mutuel.
Dire « non », c’est affirmer : “Je veux rester en lien avec toi, mais pas au prix de moi-même.”
En conclusion
Apprendre à dire « non » sans rompre le lien demande souvent plus qu’une simple technique.
Cela implique de se reconnecter à soi, de reconnaître ses limites, d’accueillir sa vulnérabilité et de créer des relations plus authentiques. C’est un chemin vers soi, un apprentissage de la présence et de l’écoute mutuelle.
Ce chemin peut se faire seul·e… ou accompagné·e.
Et si vous sentez que je peux être cette personne ressource, ce serait un honneur de vous accompagner pour expérimenter des « non » justes et respectueux.
Si cet article a éveillé votre curiosité, je vous invite à :
— Lire mon prochain article : « Comment survivre aux fêtes de famille ? Entre besoin d’appartenance et liberté personnelle» ;
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Belle journée à vous, et prenez soin de vous 🌿
Gestaltement vôtre,
Héloïse
Sources : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/conflit/18127 ; https://www.verywellmind.com/attachment-styles-2795344